Ghostwriter, écrivain fantôme, prête-plume... qu'est-ce?

D'aucuns, ardents défenseurs de la langue française et de ses subtilités, se sont offusqués de l'utilisation du terme ghostwriting dans l'intitulé de nos débats, arguant notamment que celui-ci était incompréhensible pour la plupart des gens, sous-entendu francophones. Cela dit, je ne suis pas certaine que les termes écrivain à gage... 

...ou prête-plume soient davantage compris.  Et notre événement étant un salon international de l'écriture et non un Salon francophone de l'écriture, le terme anglais pourrait se justifier. Nous n'excluons pas, en effet, d'ouvrir, un jour, les portes de notre événement à d'autres cultures et à d'autres langues. 

Mais pour la paix des ménages et comme cette première édition est effectivement centrée sur la francophonie, nous  ferons une concession à nos détracteurs qui estiment, je cite: Recourir à un intitulé incompréhensible pour l'écrasante majorité est absolument déplacé, surtout dans un évènement comme le vôtre qui s'emploie en français, à donner aux gens les clés de l'écriture, et l'idée d'en débattre ne devrait même pas vous effleurer l'esprit.

Le titre de notre débat sera donc bilingue et parmi le vaste champ des dénominations françaises possibles nous choisissons celui de prête-plume.

Nous tenons cependant à préciser que nous n'avons jamais eu l'ambition ni prétendu donner aux gens les clés de l'écriture. Nous visons  tout au plus à entrouvrir certaines portes et à montrer à quel point, justement, l'écriture recouvre de nombreux aspects.

La problématique des prête-plumes

Au-delà des questions terminologiques, il nous semble en effet important d'introduire brièvement la problématique de ceux qui prêtent leur plume à autrui.

En littérature, de nombreux écrivains célèbres ont profité de nègres littéraires. Certains, s'ils ont signé leurs ouvrages, ne les ont pas écrits eux-mêmes, ou tout au moins pas entièrement. Ainsi, Alexandre Dumas, par exemple, a bénéficié de nombreuses aides, dont Auguste Maquet qui a collaboré à nombre de ses romans. 

A l'heure actuelle, bien des politiciens font appel à des prête-plumes, que ce soit pour écrire leurs discours ou des livres signés de leur nom. 

En 2016, divers médias de Suisse Romande ont mis en avant la question des étudiants qui sous-traitent leurs travaux académiques à des auteurs anonymes, spécialisés dans le domaine - voire même à des entreprises qui offrent ce service moyennant finances.  Et lorsque l'on tape sur google ghostwriter (et non prête-plume), on trouve en tête de liste plusieurs annonces proposant de telles prestations.

Le phénomène prend une certaine ampleur en Suisse et, en 2015, plusieurs centaines d'étudiants auraient acheté leurs travaux académiques, selon une enquête de la SRF relayée par la RTS*.

Par ailleurs, des journalistes de la RTS se sont fait passer pour des étudiants et ont commandé un travail de master fictif à une entreprise française spécialisée dans la rédaction de mémoires. Celle-ci proposait de réaliser la totalité du mémoire à partir du thème proposé, et non seulement de réviser ou réécrire le travail de l'étudiant (Lire l'article détaillé de la RTS).

 

Dès lors différentes questions se posent:

  • Jusqu'où un écrivain fantôme ou un prête-plume peut-il aider autrui, sans que cela soit discutable éthiquement parlant?
  • Y a-t-il certains écrits qui ne devraient pas pouvoir être sous-traités? Lesquels et pourquoi?
  • Où se trouve la limite entre triche et aide à l'écriture? Ya-t-il une véritable dérive à ce propos? Dans quelle mesure?
  • Devrait-il y avoir une législation précise à cet égard? Que peuvent les lois actuelles?
  • Comment pourrait-on envisager l'avenir pour dégager une pratique uniforme?
  • Que peuvent entreprendre les grandes écoles pour aider leurs étudiants et comment peuvent-elles lutter contre ce phénomène éthiquement et juridiquement discutable?
  • ...

Venez nombreux débattre de la question samedi 4 mars à 15h30 à la salle polyvalente d'Echichens. Faites part de vos opinions, témoignez, parlez de vos difficultés d'écrire...

 

Article écrit par Sylvie Guggenheim

 

*Vers l'enquête de la RTS